Nous sommes en mer. Il est quatre heure du matin heure TU et déjà j’entends les discussions dans le cockpit. Véronique et Anthony, équipiers embarqués aux Açores, ont pris leur quart de nuit. Les quarts de nuit, je les adore. Ils sont toujours différents pouvant associer le drôle, l’intime, l’impressionnant de beauté ou d’étrangeté, le dur ou le tranquille, l’obscur ou le lumineux,et sont les moments les plus propices au placotage. Pour l’heure, ils parlent du froid. Oui, cette transat se détache des autres par sa destination : le froid. Je n’imagine pas bien ce qui nous attend. De l’eau à moins de 2 degrés, une bonne semaine de navigation dans le froid. Je n’ai que très peu expérience du vrai froid en mer, une seule fois en juin au niveau des Iles Féroé où l’eau à 4 degrés ne m’a laissé aucun agréable souvenir.
Le briefing météo s’est déroulé le matin du départ officiel de Ponta Delagada. Conférence en direct d’un spécialiste de Météostratégy qui nous commente le diaporama où il parle de glaçons qui sont très sud, glaçons de 8 tonnes minimum ou groler, de quoi faire vibrer les amateurs de boissons glacées et nous donner des papillons dans le ventre. Ne vous étonnez pas si des mots un peu étranges viennent enrichir mon français, mais Gilbert est québécois et nous charme de ses expressions très expressives.
Bref, on va avoir froid, du vent dans le nez, des risques liés aux glaces qui sont basses, le passage du courant Gulf Stream à celui du Labrador, les courants de marées du Saint Laurent, et surtout du près, du près du près. Le près n’est pas ce que l’on préfère. Le prés, cela vient de plus prés du vent. C’est la limite au delà laquelle le bateau n’avance plus car l’angle entre le vent et le voilier n’est plus suffisant pour obtenir une voile propulsive. Donc, « sommes toutes » comme dirait Gilbert, ce n’est pas la transat par les alizés, qui, chaque mois de novembre, voit l’Atlantique se remplir de nombreuses embarcations à voile de tout style avec des équipages aussi diversifiés que les voiliers qui les portent.
Ah, de quoi avoir des Papillons dans le ventre ! Expression délivrée par Sophie, notre futur ange gardienne pour les étapes au Québec, qui m’a demandé si j’avais des papillons dans le ventre alors que le départ de La Rochelle était imminent. J’adore cette image de papillon dans le ventre, je trouve très vivante, mais pour ma
part, me fais plus penser à du bonheur qu’à de l’inquiétude. Ceux qui ont connu Voiles de Paix et Santé en 2003, savent que le papillon était un des symboles de paix choisis par les équipages des 7 pays de l’aventure entre Marseille et Bizerte en Tunisie.
Donc, pourquoi allons nous faire route nord ouest, faire du près, se geler, …. avoir des papillons dans le ventre à cause des grolers, c’est pour allez fêter avec nos amis québécois la fondation du Québec il y a 400 ans. Le programme de fête est assuré et nous allons tous faire les beaux avec nos voiliers qui, à la façon d’aujourd’hui, retracent en vrai la route de Samuel Champlain, rochellais découvreur du Québec en 1603. Nous allons pour rencontrer les habitants du Québec ! et en plus, cette Route Thalassanté va au Québec pour rejoindre Ottawa, dans les traces de la création de la promotion de la santé en 1986. La promotion de la santé fait partis des nouveaux espaces à découvrir comme Samuel Champlain découvrit les terres du Canada. C’est certainement le plus grand challenge à venir pour chacun et l’ensemble de notre petite planète.
Bon, tout cela pour dire que nous sommes partants, battants, et …. partis de Ponta Delgada…. , que nous avons quitté le quai dans la grisaille et la bonne humeur, que, au moment d’envoyer la voile d’avant, Yves a jugé bon de vérifier une drisse en tête de mat et qu’il fit l’ascension des 23 mètres de mat par sa face avant dans des conditions peu confortables et redescendit, »contant » d’être avec nous à un altitude plus raisonnable.
Puis, surprise, nous avons eu du vent. Mieux, il s’est mis à tourner et nous avons put nous mettre au bon cap, celui de l’autre cote de l’Atlantique, le Québec. C’est parti pour des milles et des milles, l’équipage prend son rythme de vie, les quarts s’installent, nous avons vu hier un banc de dauphins, de super dauphins, sautant incroyablement haut, forts, grands. Je ne peux que crier à chaque saut tellement c’est magnifique et histoire de les applaudir. En ce moment, la vie est douce à bord. L’ambiance est méditerranéenne, donc, vous avez ressenti, bronzage, vent de travers, 8,6 noeuds de vitesse bateau, au cap, les îles de Pico et Faal sur l’arrière tribord, des mouvements agréables, l’estomac calés par des pates papillons (encore eux) à la carbonara concoctés par Véronique, bon, j’arrête, sinon je vais vous faire rêver ?
Bonne journée de Véronique, Anthony, Gilbert et Yves et de ma pomme.
PS: pour ceux qui ont suivi nos soucis de moteur, José de Ponta Delgada, dépêché par notre ami Antoine, est venu nous prodiguer assistance donc réglage de l’alignement de l’arbre d’hélice. Cependant il émet hypothèse d’un arbre très très légèrement tordu sans conséquence pour notre traversée A LA VOILE. Merci à José que nous n’avons pu revoir.